Rédiger en orthographiant

Cadrage théorique

Réflexion orthographique à l’école

Un constat : les élèves écrivent volontiers mais ne transfèrent pas toujours les travaux menés en orthographe, ce qui demande, de la part des enseignants, beaucoup de corrections des productions d’élève.

1985 : une recherche effectuée dans le Val d’Oise constate le manque de cohérence des écrits, des problèmes de syntaxe, de conjugaison et d’orthographe… Les chercheurs souhaitent alors théoriser leur réflexion en la nourrissant des apports didactiques récents alors, notamment le modèle explicatif de la production de texte anglo-saxon vulgarisé par Claudine Garcia-Debanc. Ceci aboutit à la création de l’ouvrage Former des enfants producteurs de textes (Hachette écoles – 1988) qui précise l’intérêt d’approfondir chaque étape du processus rédactionnel : planification – révision – textualisation. Dans cette démarche, le rôle de l’orthographe était bien pris en compte, mais uniquement dans le temps de réécriture.

1990 : cette démarche arrive dans les classe et on assiste à la dérive suivante : le plus important, c’est le texte, le message ; “la correction de l’orthographe viendra à la fin” disait-on alors. Les chercheurs préconisent dans le même temps de reléguer l’orthographe (processus cognitif de bas niveau) à une place secondaire au profit du niveau textuel (processus cognitif de haut niveau) pour éviter la surcharge cognitive des élèves.

Dans le même temps, la dictée devient d’apprentissage et n’est plus seulement un exercice d’évaluation. L’apprentissage de l’orthographe se cantonne alors à cette activité. Avec la rentabilité que l’on connaît aujourd’hui : lors de la conférence, Mme Morand a présenté des écrits produits sur des sites de petites annonces par des adultes d’aujourd’hui – qui étaient donc nos élèves dans les années 80 – ces écrits ne respectent ni l’orthographe, ni la syntaxe, la ponctuation y est inexistante et ne sont souvent lisibles et compréhensibles qu’à voix haute…

Dans les années 2000, avec l’apparition de la littérature à l’école primaire, on demande aux élèves de s’atteler à la production de textes littéraires forcément longs et complexes. Mais les élèves ne réinvestissant pas les apprentissages des situations de dictée, les textes produits sont tellement longs à corriger pour l’enseignant que celui-ci rechigne à proposer ces situations d’écriture.

Les failles de notre système scolaire à ce sujet ont été pointées par André Ouzoulias dans un dossier en quatre parties intitulé Démocratiser l’apprentissage de la lecture/écriture. Il y propose également des pistes pour les combler. On peut lire ce texte de 2013 dans Le café pédagogique. Les liens vers ces articles complémentaires sont ici :

En fait, l’apprentissage de la réflexion sur l’orthographe en situation d’écriture complexe n’est guère envisagée à l’école primaire.

D’où la question à laquelle tente de répondre l’ouvrage de Pascal Maillot : comment amener les élèves à  réfléchir à l’orthographe pendant qu’ils écrivent ?

Danièle Cogis et Catherine Brissaud ont déjà essayé d’y répondre dans Comment enseigner l’orthographe aujourd’hui (2011), elles proposent :

  • des tâches d’écriture brèves
  • des propositions d’écriture de textes courts reposant sur une contrainte orthographique spécifique.

Elles mettent en avant le fait que l’activité de “contrôle-révision” ne va pas de soi pour les élèves et doit donc être enseignée et explicitée.

Le geste de l’écriture, parce qu’il ralentit la mise en mots de la pensée et favorise la mise en mémoire de ce qui est à écrire, n’est pas non plus à négliger.

Leur démarche conduit aussi à enseigner la “mise en texte”, car elle n’est pas non plus naturelle. Le tout dans des situations de production d’écrit contraintes et très simples qui se situent entre la dictée (quand elle n’est pas un exercice d’évaluation) et la production de textes plus complexes et plus longs.